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Le passage entre les deux églises

Entre l'abbatiale Saint-Pierre et Saint-Paul et l'église Notre-Dame de Bethléem, une impasse conduit aux bâtiments conventuels. Ce passage est bordé, d'un côté, par les marches donnant accès à l'abbatiale et de l'autre, par une construction accueillant, au rez-de-chaussée, l'office de tourisme et, à l'étage, un gîte d'étape. Du temps des moines, entre les deux églises un porche, la "porte de l'abbé", marquait la limite entre la place des églises et la "cour de l'abbé" ; au dessus de ce porche s'élevait un bâtiment de même hauteur que la nef de Notre-Dame de Bethléem. Le porche a été détruit en 1854 ; la partie du bâtiment jouxtant l'église existe encore.
D'après plusieurs auteurs, un passage permettait de passer directement de l'une à l'autre des deux églises ; il en reste, dans le couloir entre l'office du tourisme et le gîte, une porte qui s'ouvre dans la sacristie de Notre-Dame de Bethléem.
Le logis abbatial et le cloître

Passant entre les deux églises, on découvre sur la gauche ce qui reste des bâtiments conventuels. Ils sont aujourd'hui occupés par l'hôtel de ville.
Une porte de style renaissance s'ouvre dans le mur et par quelques marches, permet d'accéder à une grande cour, utilisée comme parking. C'est l'ancienne porte du réfectoire des moines, placée là au XIXe siècle. En ce lieu se trouvait le logis de l'abbé, adossé à la façade sud de l'abbatiale. Le rez-de-chaussée était réservé à ses serviteurs. C'était un vaste bâtiment, qui devait aussi accueillir les visiteurs illustres et surtout le roi et sa suite, après la destruction du fort.
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Séjours des rois de France à Ferrières
L'ensemble des édifices formait un quadrilatère entourant un cloître. Dans la symbolique monastique, le cloître est le cœur du monastère, son jardin représentant symboliquement le paradis terrestre perdu par la faute d'Adam et Eve. Les moines y circulent en silence et à pas mesurés. Avant les offices, c'est là que la communauté se range, par ordre d'ancienneté (les plus jeunes devant) pour entrer en procession dans l'abbatiale.
Un arc-boutant appuyé au mur de l'abbatiale compense la disparition du cloître qui soutenait le transept sud ; il a été construit en 1821 ; la date a été gravée avec cette mention : Fait par Polle et Closson sous Marat maire. Au-dessous, se trouve la porte conduisant au transept. Elle est surmontée d'un arc en accolade de style renaissance, agrémenté de sculptures en partie détruites. De chaque côté, se devine une corne d'abondance dont semble sortir un personnage. Au-dessus, on distingue la trace d'une fenêtre aujourd'hui obstruée, qui donnait dans l'abbatiale. Une autre porte dissimule un escalier de pierre, "l'escalier des Mâtines", du XVe siècle : il permettait d'accéder au dortoir, qui se trouvait au premier étage du bâtiment, au niveau de la mairie actuelle.
Si, à l'étage, rien de l'époque monastique n'a été conservé, il n'en est pas de même au rez-de-chaussée. Trois grandes portes ouvrent sur la salle capitulaire et les petites, sur le réfectoire. On peut y entrer à l'occasion de cérémonies, d'expositions ou de visites accompagnées.
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Porte vers le transept

Faux puits mais vraies fosses.

Dans la cour de la mairie, on remarque, sur la droite, un puits souvent fleuri. En réalité, ce n'est qu'une margelle, placée à l'emplacement des… fosses d'aisances. Ces dernières ont donné beaucoup de souci à la municipalité au cours de la première guerre mondiale. En février 1918, on décide de les curer deux surtout étaient archi-pleines, en donnant comme motif urgent l'arrivée très prochaine du groupe d'autos sanitaires américaines. Mais l'opération s'est révélée beaucoup plus complexe que prévu pour les motifs que quoique les matières fussent couvertes d'urine (c'est) un mélange de bouts de planches, verre, vaisselle et bouteilles cassées, jupons, robes d'émigrés jusqu'à des bourgerons (courtes blouses en grosse toile) de soldats tant et si bien qu'elles ne pouvaient être aspirées par le tuyautage des pompes sous pression. Les ouvriers chargés du travail pensent faciliter l'opération en arrosant le tout et le délayant au moyen d'un bouloi (instrument pour remuer la chaux) et en retirant les objets baroques qui s'y trouvaient. Mais les travaux se prolongent et la municipalité préfère arrêter le travail au bout de deux jours pour éviter des dépenses trop élevées. Le lendemain, les Américains arrivent et le commandant Hall fait convoquer Monsieur Chartier, faisant office de maire, pour lui demander d'achever le curage des fosses, et lui remet dans ce but la somme de 400 francs. Aussitôt les ouvriers sont de nouveau appelés, les prix renégociés puis l'artisan se mit avec des ouvriers immédiatement à l'œuvre et termina le travail selon le désir exprimé par Monsieur le commandant Hall. Le commandant Hall, les blessés américains et les Ferriérois ont pu ainsi bénéficier de fosses d'aisances propres.
En 1931, la municipalité décide de construire deux urinoirs et un cabinet clos sur l'emplacement de ces fosses d'aisance ; ce sont ces toilettes qui ont laissé la place dans les années cinquante au puits que l'on peut voir aujourd'hui.

La salle capitulaire

Les deux salles sont recouvertes par des voûtes en arcs brisés du XVe siècle, qui datent des reconstructions postérieures à la guerre de cent ans. La salle capitulaire est de forme carrée, comme il se doit, et des bancs en pierre devaient être disposés tout autour de la pièce. La communauté s'y réunissait régulièrement pour lire un chapitre de la règle de saint Benoît et pour écouter les conseils de l'abbé. C'est aussi là que les moines recevaient les consignes de travail, s'accusaient publiquement de leurs fautes et se faisaient "chapitrer", c'est-à-dire entendaient les reproches publics voire les pénitences infligées par le supérieur en cas d'erreurs graves. Les grandes décisions concernant l'abbaye y étaient discutées et prises : élection d'un nouvel abbé jusqu'au concordat de 1516, puis d'un nouveau prieur, lancement de travaux, fondation d'une nouvelle communauté ou réforme du mode de vie. C'est sans doute là que le prieur de l'abbé Pierre de Martigny reçut le coup qui lui fut fatal, à la suite de discussions doctrinales. L'abbé y informait aussi les moines sur la situation du royaume et donnait éventuellement lecture de lettres qu'il avait reçues. Ainsi, l'abbé Loup de Ferrières écrit à l'un de ses correspondants : "On nous a remis il y a quelques temps une lettre indiquant le jour de votre rentrée au monastère. Cette lettre a été lue au chapitre, appréciée par tous comme elle le méritait, et nous y avons répondu en conséquence." Après l'abbatiale, la salle du chapitre est donc le deuxième pôle de la vie communautaire : une abbaye ne peut fonctionner sans ce lieu de réunion et de discussion.

De la convocation des frères au conseil

Toutes les fois qu'il faudra traiter d'affaires importantes au monastère, l'abbé convoquera toute la communauté et dira de quoi il s'agit. Ayant entendu l'avis des frères, il en délibérera par devers lui et fera ce qu'il jugera le plus utile. Nous disons que tous doivent être convoqués au conseil, pour cette raison que le Seigneur révèle souvent à un plus jeune ce qui doit être préférable. Les frères donneront leur avis en toute humilité et soumission, et n'auront pas l'audace de défendre effrontément leur opinion. La décision dépend plutôt de l'abbé, et tous lui obéiront en ce qu'il aura jugé être le plus avantageux.

Règle de saint Benoît
, chapitre 3.

Aujourd'hui, la salle capitulaire est devenue salle des mariages et les emblèmes de la République ont remplacé ceux de la religion : contre le mur sud, les photos des derniers présidents de la République ont été conservées ; celui en exercice est à la place d'honneur, sous le buste de Marianne.
Contre les fenêtres, visible de l'extérieur, a été placée une maquette de l'ensemble du monastère réalisée par les monuments historiques. Les parties détruites, plus claires, se distinguent aisément.
La chapelle Sainte-Elisabeth

De la salle du chapitre, l'abbé pouvait accéder à la chapelle Sainte-Elisabeth par une porte surmontée d'un fronton triangulaire. C'est Louis de Blanchefort qui eut l'idée de faire construire au sud-est de l'abbatiale cet édifice réservé à l'abbé, qui venait y prier et s'y reposer à l'écart de la communauté. La pièce, de forme rectangulaire, est enchâssée dans une série de constructions, ce qui explique le peu de lumière qui parvient à l'intérieur.
La pénombre et la fraîcheur qui y règnent créent une atmosphère de recueillement. Au fond, un autel surélevé par trois marches rappelle la fonction du lieu. La restauration de 1995 a permis de raviver, en partie, les fresques d'origine. Les murs étaient décorés par des frises de lions rouges rugissants inspirées des armoiries de l'abbé maître d'œuvre, Louis de Blanchefort. Ils étaient tous différents les uns des autres et ont été remplacés par des séries de figurines identiques appliquées au pochoir lors d'une restauration récente.
Dans chaque travée des phylactères contiennent des citations latines, qui n'ont pas encore été déchiffrées. Les voûtes sont peintes en bleu avec de petites étoiles, décor qui n'est pas sans rappeler celui de la Sainte-Chapelle. Au nord, un enfeu, placé juste sous une gouttière de l'abbatiale, marque le lieu où avait été enterré l'abbé saint Aldric. Face à cet emplacement, on peut admirer une porte en chêne sculpté. Elle est ornée de quatre arbres : deux chênes et deux oliviers auxquels sont accrochées les armoiries de Louis de Blanchefort. Le sculpteur a inscrit son nom sur la partie supérieure, à cheval sur les deux vantaux : Pougier (ou Pongier) me fecit c'est-à-dire "Pougier m'a fait(e)", avec la date de 1487. Cette porte conduisait dans un second cloître, plus petit que le premier, disparu aujourd'hui et qui aurait été réservé aux convers, puis aux moines ayant refusé la réforme de saint Maur.
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De la fraîcheur de la chapelle sainte Elisabeth.

Tout visiteur qui pénètre dans la chapelle sainte Elisabeth est immédiatement enveloppé par la fraîcheur qui y règne, été comme hiver. Ainsi, au XIXe siècle, elle servit de cellier à un aubergiste du voisinage devenu maître des lieux. Cet homme était peu intéressé par le passé prestigieux de l'édifice... Ronceray écrit : il était très ignorant de ces sortes de choses !!! D'ailleurs il échangea la porte sculptée par Pougier pour d'autres portes massives en chêne et quelque argent en retour. Peut-être craignait-il pour la sécurité de ses réserves ?
Le gagnant dans cet échange fut Monsieur Lemesle qui plaça la fameuse porte dans sa propre chapelle au château de Toury.
Aujourd'hui la porte a retrouvé son emplacement d'origine, mais il fait toujours aussi frais dans la chapelle.

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