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De la place Terre Chaude, monter vers la place Saint-Fiacre ; prendre, de l'autre côté de la place, la rue de la Triperie, puis à gauche, la rue des Charrières.
A l'extrémité de cette rue, tourner à droite dans la rue Fonteine-Bourgoin, puis de nouveau à droite rue du Lion d'Or et à gauche place Charles Carré.
La place Charles Carré débouche dans la Grande Rue, que l'on remonte jusqu'à la place Saint-Macé et la rue des Fossés.
La place Saint-Fiacre

Quittant la place Terre Chaude, qui était autrefois hors les murs de la ville, on débouche sur la place Saint-Fiacre, au lieu même où autrefois se trouvait, dans le mur d'enceinte, la porte Saint-Pierre. Cette porte, défendue par deux tours, ouvrait sur le faubourg Saint-Eloi qui conduisait à l'église paroissiale.
On laisse alors sur la gauche la rue de la Denizerie. C'est, dit-on, dans les villes de cette région, le faubourg où se logeaient les "étrangers" qui n'avaient pas (encore) droit de cité.
En face, la rue Montante suit le tracé de la muraille nord.
Sur la place Saint-Fiacre a été édifiée en 1902 une halle aux veaux, détruite en1913.
Elle marquait l'entrée dans la ville des marchands et des artisans, comme le rappellent les noms des rues qui en partent : vers l'est, la rue des Vieilles Halles, dont les petites maisons basses étaient naguère ornées de vignes grimpantes ; vers le sud, la rue de la Triperie.

A l'angle de la place, au carrefour des rues de la Triperie et des Vieilles Halles, se trouve l'ancienne église Saint-Fiacre, construction du XVIIe siècle dont la façade et la toiture sont remarquables.
Pour pallier l'éloignement de l'église paroissiale de Saint-Eloi, une première chapelle dédiée à Saint-Fiacre avait été construite en 1595 grâce à la générosité du sieur Rognion, prêtre demeurant à Ferrières ; la rue du Petit-Saint-Fiacre y conduisait. Cinquante ans plus tard, pour des raisons diverses, parmi lesquelles sans doute l'exiguïté, elle n'était plus guère fréquentée et fut remplacée par une construction plus imposante, commencée en 1669. Le curé de la paroisse reçut l'autorisation d'y exposer et d'y conserver le Saint Sacrement et d'y dire la première messe les fêtes et les dimanches. Au XVIIIe siècle, le curé Lemaire, qui avait fait exécuter de grands travaux à l'église Saint-Eloi, ordonna de même des embellissements à la "chapelle" Saint-Fiacre, qui fut en particulier ornée d'un clocheton ; le 6 mai 1770, on fit en grande cérémonie le baptême d'une nouvelle cloche, sous les noms de Pierre Judes et Mathurine. Le parrain fut Jude Bordier, marchand tanneur, marguiller en charge et ancien échevin de cette ville , et la marraine Dame Louise Françoise Mathurine Simon, épouse de Sieur Mathurin bordier marchand tanneur et premier échevin de cette ville.
C'était l'église intra muros. Tout un quartier lui doit son nom. A Saint-Fiacre, étaient adjugés chaque année au mois de mai ou au mois de juin, un dimanche et à une heure de l'après-midi, par le notaire royal de Ferrières, la récolte des prés appartenant à l'église et fabrique de Saint-Eloi de Ferrières. A l'époque de foi qui précéda la Révolution, les habitants en faisaient un centre religieux, et c'est à l'un de ses murs que fut scellée en 1769 l'armoire contenant les archives municipales. Là enfin, le 9 mars, furent rédigés et signés les cahiers de doléances du Tiers Etat.
Au fil des rues

La rue de la Triperie longe la façade ouest de l'ancienne église sur laquelle se voient encore les traces des percements anciens. Elle est bordée à gauche de vieilles maisons : la plus intéressante est, au n°18, la "maison Amaury" qui porte, inscrite sur la clef de voûte de sa porte d'entrée, la date de 1772. C'est à l'angle de cette rue et de la rue des Charrières, du côté droit, que se trouvait le café Saint-Vincent, longtemps siège de la confrérie du même nom.
A l'opposé se trouve une grande et belle demeure dont on longe la façade nord en remontant la rue des Charrières, autrefois artère vitale de ce quartier commerçant, par laquelle s'écoulait le trafic des voitures livrant et emportant les marchandises. Cette façade porte les marques de remaniements successifs ; on remarquera en particulier une gargouille en pierre et un curieux masque sculpté au-dessus de la plus haute fenêtre.
A son extrémité la rue des Charrières débouche dans la rue Fonteine-Bourgoin, face au porche d'une maison appelée "prieuré". La rue Fonteine-Bourgoin, du nom d'une bienfaitrice de la ville, était autrefois la rue Saint-Mathurin : elle traversait la ville du nord au sud, franchissait les remparts à la poterne du même nom.
Poursuivant la promenade, on peut alors descendre la rue du Lion d'Or, où on remarquera sur une façade à droite, une pierre sculptée aux armes de Louis de Blanchefort surmontées de la crosse.
La place Charles Carré est une création moderne : la rue de la Triperie était autrefois prolongée, à ce niveau, par une ruelle rejoignant la Grande Rue ; une trace sur le pavement de la place en conserve le souvenir. Les maisons bordant la ruelle ont été détruites pour faciliter le passage vers l'autre axe commerçant de la cité. La fin du XIXe siècle a été, en effet, à Ferrières, une période d'urbanisation intense et de grands projets d'aménagement, qui n'ont pas tous été menés à terme. En particulier, l'évolution des transports en qualité et en intensité a imposé l'élargissement des rues médiévales. Il y eut même un projet de percement entre la place des Eglises, où se tenait le marché, et la Grande Rue.
La Grande Rue est, comme son nom l'indique, l'artère principale de la cité ; parallèle aux murailles de l'abbaye, c'était la rue des changeurs et des commerçants, bordée de belles demeures dont certaines, bien restaurées, ont subsisté. On remarquera, par exemple, au n°6, à côté d'une jolie porte en accolade de style Renaissance, une fenêtre à meneau de pierre, dont on peut penser qu'elle a été rapportée.

Les rues de Ferrières

La toponymie n'est certes pas une science exacte et elle donne lieu plus souvent à des interprétations qu'à des explications incontestables. Ceci posé, si l'on considère que l'histoire d'un peuple peut se lire à travers sa langue, on peut aussi admettre que celle d'une ville peut être lue à travers les noms de ses rues et autres noms de lieux.
Le nom même de Ferrières tire son origine de l'activité économique majeure qui marqua sa naissance et ses premiers développements : l'exploitation du fer et l'installation de forges et de forgerons, d'où le nom de La Place des Forges, la rue des Forges et la rue Neuve des Forges
Certes, l'histoire récente a apporté sa contribution à Ferrières qui, comme toutes les villes de France possède sa place du Onze Novembre, sa rue du Maréchal Leclerc, son avenue de la Libération, sa place du Huit Mai… Mais nombre de noms de lieux de la ville, rues, places, remontent sans doute au Moyen Age puisqu'on les voit apparaître dès le XVIIe siècle, sous la plume des historiens de l'abbaye qui les citent comme ayant été trouvés dans des documents "censiers" de l'abbaye et datant donc de périodes plus anciennes.
Un certain nombre de ces noms ont disparu : la rue de la Drapperie (sic), la rue Sainte Potentienne, la place Drotin, la place des Pressoirs, le carrefour du Puits de la Chaîne, (sic - mais il reste la rue de la Chaîne), la Halle au blé, la rue Faton, la rue des Juifs… En revanche, subsistent : la rue des Charrières (dont le nom vient de char, ce qui semble indiquer que ladite rue permettait le passage des charrois et charrettes), la rue de la Triperie, la rue du Perray (dont le nom est dérivé de pierre, référence, selon certains, au fait qu'elle était empierrée), la Croix de Bethléem, la rue de Cléry, la place des Forges, la rue de Bourrienne, la place Saint-Macé, la rue Saint-Eloi…
Nombreuses sont les appellations qui renvoient à une activité économique, souvent très ancienne, telles les rues de la Blanchisserie, de la Triperie, de la Pêcherie, des Forges, la place du Four. La rue des Juifs, était sans doute la partie haute de l'actuelle Grande Rue, dont la partie basse s'appelait alors rue de Bethléem : c'était, près des portes de la ville, le quartier des changeurs et des usuriers, avec la rue de l'Ecu qui la coupe. Les rues du Plat d'Etain, du Lion d'Or, que l'on retrouve dans de nombreuses villes anciennes de France, doivent probablement leur nom à des enseignes commerciales, d'hôtelleries ou d'estaminets par exemple.
La place du Martroi se réfère, quant à elle, à une activité moins plaisante : de même origine que martyr, martroi signifie souffrances, et se rapporte à celles des condamnés lors des supplices qui leur étaient infligés publiquement sur cette place.
La place Terre Chaude pourrait devoir son nom à une autre activité économique d'un type un peu particulier, une activité dite "chaude", aussi ancienne, dit-on, que l'humanité, et qui par suite d'un édit royal de saint Louis, devait s'exercer à l'extérieur des enceintes de la ville.
D'autres dénominations font référence à la proximité d'un édifice religieux : Saint-Macé, Saint-Fiacre, Saint-Eloi, Sainte-Apolline, la cour du Couvent ou la place des Églises. La rue du Biquin d'or renvoie naturellement à la légende du même nom (voir Hors les murs, Le biquin d'or).
Le nom de la rue de la Chaîne est intéressant : selon Picard, ce chemin devrait son nom à la "chaîne" des forçats qui l'empruntaient quand on les conduisait au bagne. Quant aux martinets (rue des Martinets), il s'agirait des petits marteaux des forges qui étaient mus par l'énergie hydraulique de la Cléry (voir Le long de la Cléry, A propos des Martinets).
Plusieurs noms de lieux ont une référence géographique : la rue de la Queue de l'étang et celle du Bas de l'Etang, le boulevard de la Brèche, la rue des Fossés et la rue des Fossés prolongée, tiennent leur origine respectivement de la présence de l'étang des Moines et des ancien fossés qui longeaient les remparts de la ville,la rue des Roches et celle de la Grosse Pierre de la proximité des menhirs …
Mais ici comme ailleurs, c'est à des personnages ayant joué un rôle dans l'histoire de Ferrières ou des environs que certaines rues doivent leurs noms : J. Jacquemin, fondateur du premier asile de Ferrières en 1631 ; Mirebeau, homme politique, député français de la région ; Fonteine-Bourgoin, du nom de Mme Bourgoin, bienfaitrice de la ville ; Gaston Lempereur, Georges Brière, Gérard Paris, Charles Carré, Ferriérois morts pendant la seconde guerre mondiale des suites de faits de guerre, de résistance ou de déportation.

Remontant vers la place Saint-Macé, la Grande Rue franchissait le rempart oriental à la porte de Sens, jouxtant la porte Saint Macé, entrée de l'abbaye. La dernière maison à gauche, au n°27 abrita un temps, au début du XXe siècle, la gendarmerie, avant son transfert dans les locaux actuellement occupés par la Mairie à l'abbaye. A l'intérieur de la cour pavée, on peut encore y voir le local du planton, la prison, ainsi que les écuries. La dernière maison à droite, à l'angle de la place Saint-Macé abritait autre fois le modeste commerce d'un limonadier. C'est là que naquit, le 7 juillet 1854 Célestin Adrien Marie Soret, physicien et radiologue, mort le 22 juin 1931, emporté par une radiodermite : une plaque en perpétue la mémoire.

Célestin Adrien Marie Soret (7 juillet 1854 - 22 juin 1931)

Ses premières études ouvrirent à Célestin Soret, fils d'un limonadier ferriérois, les portes de l'Ecole Normale d'Instituteurs d'Orléans. Poursuivant des études après deux ans d'enseignement dans une école primaire, reçu à l'agrégation de physique, Célestin Soret enseigna dans les lycées de Tonnerre, de Beauvais, d'Orléans et enfin du Havre.
Animé par un souci de vulgarisation scientifique, il organise dès 1886 des Cours municipaux dans lesquels il traite de questions scientifiques d'actualité tels que les effets de l'électricité, la découverte des rayons X…
Puis, il se consacre à la photographie ; crée la Société havraise de photographie, multiplie les conférences, séances de travail en laboratoire, séances d'initiation, publications.
Sa curiosité le pousse à s'intéresser à des domaines fort divers : météorologie et prévision du temps, galvanoplastie sur les éléments végétaux et animaux, encres d'impression des billets de banque…
Un an après la découverte des rayons X (1895), il monte à son domicile un générateur de rayons et se livre aux premières expériences de radiographie. Quatre ans plus tard, il est chef du Service radiologique des Hôpitaux du Havre, soutient une thèse de médecine et mène de front sa carrière d'enseignant, de médecin et ses activités de photographe.
Nommé professeur honoraire en 1907, il se consacre entièrement à la recherche et à la pratique des rayons X.
A soixante quatre ans, en 1919, il ressent les premières atteintes de la radiodermite qui devait l'emporter le 22 juin 1931, à l'âge de 77 ans.
Il avait reçu en 1924 la croix de chevalier de la Légion d'Honneur, et en 1928 la médaille de l'Ordre de la Couronne de Belgique en remerciement des soins donnés aux combattants belges lors de leur séjour dans les hôpitaux du Havre.

Ce rapide parcours permet de découvrir que toutes les rues ainsi contenues dans le périmètre des murailles se croisent et se rejoignent selon des angles droits.
Un tel plan orthogonal est caractéristique des villes gallo-romaines : selon une première hypothèse, l'abbaye aurait pu s'établir auprès d'une agglomération de forgerons dont la présence dans la région à cette époque est attestée. Autre hypothèse, sans doute plus plausible quoique difficilement vérifiable à l'heure actuelle : aux premiers temps du sanctuaire, les fidèles nouvellement convertis se seraient établis sous la protection de l'abbaye, développant vers l'ouest et le nord, une ville mérovingienne, sur un même plan orthogonal, classique aussi à cette époque, dont les rues de la ville actuelle conserveraient la trace (voir Une petite ville du Bocage gâtinais, Les habitants).
Comme en conservent la mémoire nombre de vieilles maisons.